A/2. Ah les filles !
Vilma quant-à elle, était déjà passée à table. Elle avait tout de suite tapé dans l’œil de Joë, qui n’osait pas dire ce qu’il pensait : Bon sang, ce qu’elle est belle cette fille ! Elle ferait damner un saint. Si elles sont toutes comme ça à Felicidad, je suis pas prêt de me faire moine, moi. J’ai aucune chance de toute manière, elle n’a d’yeux que pour Abdoul. Et lui, il s’enfile ses sandwiches sans se rendre compte de la veine qu’il a. Y en a qui connaissent pas leur chance.
Vilma, en effet, semblait bien apprécier Abdoul. Elle ne tarissait pas d’éloges sur ses sandwiches
- Vous les faites avec du pain de mie ? Et qu’est ce que vous avez mis dedans ? On dirait qu’il y a des cornichons.
- Des cornichons, de la moutarde et des tranches de rôti porc cuit, l’informa Abdoul.
- Je me disais aussi… ils sont bien meilleurs que les miens. Moi je suis nulle en cuisine. Mais je demande qu’à apprendre. Vous êtes cuisinier de métier ?
- Heu-non ! Voyez-vous, pour le moment, je cherche du travail dans les affaires.
- Un futur magnat, alors ?
- Pas encore, mais je désespère pas de le devenir un jour.
- Regardez-la ! Si seulement j’avais autant d’aplomb, pensait Sally en voyant Vilma se resservir des sandwiches afin de tenir compagnie à Jean-Paul et André. Elle a horreur des cornichons, mais, pour se faire bien voir, elle serait prête à en manger sur la tête d’un teigneux. Avec elle et Laurène, j’ai aucune chance. Elles ont la technique avec les mecs.
Effectivement, Vilma semblait faire l’unanimité. Elle trouvait toujours quelque chose de plus ou moins intéressant à raconter et les garçons buvaient ses paroles. Même André, qui pourtant se targuait d’être misogyne, Elle les avait branchés sur les voyages, elle qui n’avait jamais pris que le car de Simcity à Felicidad, et ils se montraient intarissables.
- Rien ne vaut le train, prétendait Jean-Paul, on est sûr d’arriver à l’heure
- Ha-ha, le train ! Tu plaisantes ? Moi je dis qu’il y a que l’avion, t’as à peine le temps de te rendre compte, t’es déjà rendu à l’autre bout de Simland.
- L’AVION ! Je serais morte de peur avant d’atterrir. Vous n’avez pas peur, vous André ? Avec tous ces accidents…
- Meuh-non, je vous assure que l’avion c’est encore plus sûr que la voiture. Tiens, au fait, en parlant de voiture… faudrait peut-être penser à en acheter une. On va quand même pas rester cloîtrés ici.
- Vous n’avez pas faim, les filles ? finit par proposer Jean-Paul en voyant Vilma se resservir une troisième tournée de sandwiches.
- On crève la dalle, tu veux dire, approuva Miguel, à qui on n’avait rien demandé.
- Bon, je vous en tartine une tournée. Ils ne valent peut-être pas ceux d’Abdoul, mais je ferai de mon mieux. Hé, Abdoul, tu mets combien de cornichons ?
- C’est vraiment très aimable à vous, Jean-Paul, dit Sally en prenant place à table. J’avais comme un petit creux
- Moi aussi, appuya Laurène. Vilma, tu aurais pu en laisser pour les autres. Tu manques complètement de savoir-vivre.
Vilma prit l’air faussement gêné
- Vous trouvez que je manque de savoir-vivre, Miguel ?
- Pas du tout ! Vous faites honneur à notre cuisine, c’est un bon point pour vous.
Elle triomphait
- Ah, tu vois !
- Oui-ben, Miguel n’osera pas te le dire, mais je te le dis, moi : T’es vraiment sans-gêne ! lança Laurène en suivant d’un sale œil le manège de Miguel, qui proposait
- Mais, faut me tutoyer, Vilma !
Sally donna le signal du départ
- Je crois que nous avons assez abusé… j’ai été ravie de faire votre connaissance, mais nos amies vont se demander ce qu’on fabrique.
- Oooh, vous nous quittez déjà ? C’est pas gentil, ça, protesta Miguel
- Nan, je vous assure, il se fait tard, il faut vraiment qu’on parte maintenant. Vous pourrez peut-être venir nous rendre visite à votre tour ? dit Sally en prenant sur elle.
Miguel prit congé de Laurène
- Alors, c’est vrai, on doit se quitter ? Vous auriez pu rester encore un peu. On vous fait peur ? On va pas se transformer en loups garous parce que la nuit est tombée.
- Je serais bien restée un peu, mais, quand tu connaîtras mieux Sally… elle et sa peur de déranger !
- Tu me bigophones ? On pourrait se revoir sans elle
- Ca pourrait bien se faire, lui assura Laurène.
- Rha, Sally, ce que tu peux être pénible ! se plaignit Laurène. Y avait rien qui pressait. Pour une fois qu'on s'amusait bien.
Sally répliqua
- Parle pour toi et pour Vilma. Vous n'avez pas arrêté d'allumer les garçons. Mais moi, je tiens à ma réputation. Il fait nuit, il est l'heure de rentrer. Surtout que demain, ils ont du boulot, eux ! Mais vous ne pensez qu'à votre petit plaisir. Vous vous en fichez qu'ils soient crevés pour aller au travail.
- Gna-gna-gna, écoutez la voix de la sagesse ! lança Vilma sur le mode ironique. Puis elle sourit en pensant à tout ce qu'elles auraient à leur raconter à Mandy et Donna. Elles allaient être vertes de jalousie.
Les garçons aussi avaient des choses à se dire. A commencer par Miguel et André
- Ote tes pieds de là ! C’est pas parce que j’ai accepté de partager la chambre avec toi qu’il faut te croire tout permis. C’est MON lit, j’aurai l’air de quoi, si je ramène une fille et que la couverture est toute cradingue ?
- Ha-ha-ha, laisse-moi rire ! s’esclaffa André. C’est pas parce que la blondasse, -comment elle s’appelle déjà ? Ah-oui, Laurène- c’est pas parce que t’as l’air d’avoir une touche avec Laurène qu’elle est prête à partager ton lit. Tu te fais des illusions, mon coco.
- En tous cas, je suis mieux barré que Joë, t’as vu ? Il a même pas réussi à en brancher une, protesta Miguel. André était de son avis.
- Ca t’as raison ! Quel crétin ce type, à part ses bouquins, il connaît rien de rien à la vie. T’as vu, il a même pas pu placer un mot. Ca lui sert à quoi de se farcir la tête de connaissances s’il est pas fichu de tenir une conversation ?
- Parle pas si fort, s’il t’entendait, conseilla Miguel
- Ben qu’il entende, ça lui fera les pieds ! Il m’énerve ce type à toujours prendre des airs supérieurs avec nous.
De l’autre côté de la porte, Joë avait tout entendu
- Tu les entends, Jean-Paul ? Ils se fichent de moi !
- Laisse-les dire. Le Miguel se croit plus malin que tout le monde, mais il l’a pas encore embrassée, sa blonde. Quand il en sera au baiser langoureux, il pourra parler. Pour le moment, il est comme les copains : il espère. Laisse tomber tes bouquins, t’as pas sommeil ? Moi je vais me pieuter.
- Mais quand même, insista Joë au moment d’aller se coucher. J’ai pas le truc avec les filles. Comment vous faites ? Moi, elles ne me remarquent même pas. Tiens, toi, Jean-Paul, je suis sûr que si tu voulais, la petite Sally…
- Mais y a pas de truc, t’as juste à être naturel. T’en fais pas, va, c’est pas les filles qui manquent, y en aura bien une qui succombera à ton charme. Mais, un conseil : te la joue pas trop intello, ça fait peur. Tu sais, avec les filles, c’est pas ce qu’on a dans la tête qui compte. Sois beau et tais-toi, le genre mystérieux, ça plait beaucoup.