A/15 Mieux vaut en rire
Heureusement, Grand Sim, heureusement qu’André n’allait jamais avoir vent de la scène dont personne ne fut témoin. Il aurait tout de suite été éclairé sur le chemin qu’il lui restait à accomplir dans le dressage de sa panthère : Vilma déposant un sac de crottes. Vilma y mettant le feu en riant, Vilma enfin, qui allait s’en vanter auprès de Mandy et Sally.
- C’est pas parce qu’il m’a demandée en mariage que j’ai oublié que ce rendez-vous avait commencé en cauchemar. Je lui apprendrai moi, à me faire une scène pour quelques minutes de retard.
- Mais t’es malade ! T’es folle ? Au secours, elle est complètement folle ! s’était écriée Mandy. Tu veux qu’il rompe vos fiançailles ou quoi ?
- Meuh-non, il romprait pas pour ça ! C’est juste une farce, une plaisanterie, avait répondu Vilma.
- Heu, Vilma, je suis de l’avis de Mandy, vaudrait mieux pas qu’il trouve ça. En tous cas, moi je sais bien que Jean-Paul n’apprécierait pas.
- Ah-bon ? Vous croyez qu’il faut que j’aille le récupérer ?
- Et en quatrième vitesse, avait acquiescé Mandy. Tu pouvais pas lui offrir un bouquet de roses rouges, comme tout le monde ?
Elles ne l’avaient pas forcée, notez bien. Mais c’est tout de même grâce à elles qu’André avait pu découvrir un énorme bouquet de roses. Il l‘avait aussitôt placé sur une table de nuit près de son lit, afin de conserver sous les yeux, du réveil au coucher, la preuve de son amour pour lui. Et il ne se lassait pas de lire et de relire le billet qui l’accompagnait : « Qui aurait cru que deux Sims comme nous… ». S’il avait été moins avare de ses secrets, il aurait pu en détecter la source d’inspiration. Oui-mais le bouquet, c’était « touche pas à mon pot ! » alors, il pouvait pas deviner.
Lorsqu’il était rentré de son rendez-vous son petit panier à la main, André avait pu remarquer que le nouveau lotissement, dont tout le monde parlait, venait d’être viabilisé.
- Elles m’ont pas l’air mal, ces maisons, lança-t-il à Joë, qui lisait le journal au soleil avant de partir au travail.
- Ouais, pas mal, répondit Joë, sans prendre la peine de lever la tête. On est allé en visiter un après le départ de Miguel, Jean-Paul et moi. C’est jamais que des F2, faudrait y faire pas mal de frais. Ce qui est marrant, c’est qu’il y en a cinq. Un pour chacun de nous, si on voulait.
- Enfin, si on voulait ou si on pouvait, faudrait déjà être en couple ! souligna-t-il en repliant le journal.
- Moi, c’est plus qu’une question de jours, l’informa André. Je viens de demander la main de Vilma. Mais… tu parlais du départ de Miguel ? Ca y est ? Il s’est enfin décidé ?
Tout en parlant, les deux hommes étaient entrés dans la maison. Ce qui permit à Jean-Paul, toujours une oreille à la traîne, d’entendre la fin de leur conversation. Il s’empara du journal avant qu’André n’en ait l’idée et mit son grain de sel dans la soupe.
- Mouais, décidé, c’est vite dit, mais il est allé voir Laurène. D’ici qu’il rapplique dans dix minutes avec sa bague…
- Pourquoi tu dis ça ? Jean-Paul ? Il y est allé pour faire sa demande, non ? s’étonna André.
- Oui-oui… enfin, c’est ce qu’il a dit, mais il m’avait pas l’air motivé-motivé. De toutes façons, on en saura plus quand Abdoul rentrera du travail.
- Pourquoi ? Il est où Abdoul ? interrogea André.
- Abdoul, il est parti aux nouvelles. Il voulait savoir comment ça c’était passé. Enfin, c’est plutôt moi qui en avais eu l’idée, mais comme il voulait voir Donna… je me suis sacrifié. On voulait pas que ça ait trop l’air d’une opération commando.
Tout ça pour lui faire comprendre, que s’il n’en savait pas plus long, c’était vraiment pas de sa faute.
Et c’est ainsi, qu’après les compliments d’usage à la nouvelle fiancée, Donna eut la surprise et la joie, de voir apparaître Abdoul à une heure où d’habitude, il était déjà en route pour son travail. Elle courut à sa rencontre et ils se regardèrent un peu gênés, ne sachant quelle contenance adopter.
- Bonjour Ab… commença Donna, mais à ce moment, Adboul approcha ses lèvres des siennes et ils scellèrent leur réconciliation d’un long baiser d’amoureux.
Ni l’un ni l’autre n’aurait voulu mettre fin à ce baiser. Quand leurs lèvres se séparaient, ce n’était que pour mieux se prendre et se reprendre encore.
Ca dura… le temps que ça dura.
Abdoul le premier, s’efforça à se ressaisir
- Ah, Donna, si je m’écoutais, je passerais ma vie à t’embrasser, mais j’ai à peine dix minutes. Je suis venu aux nouvelles. Alors, comment ça c’est passé avec Miguel ?
- Tout s’est déroulé comme prévu, l’informa Donna. Avec les filles on a bien vu l’heure qu’il ne sortirait jamais la bague, il voulait juste emménager. Il essayait encore de la mener en bateau, tu comprends.
- Oui, ça m’étonne pas de lui, et Laurène, telle que je la connais, elle aurait été capable d’accepter.
Donna le détrompa
- Oh, Laurène, elle a bien changé. Je crois qu’elle se méfie maintenant.
- Il faut vraiment que j’y aille, Donna, je dois honorer mes rendez-vous… Avec des clients, je te rassure.
- Ah, c’est vrai ! Je t’ai pas félicité pour ta promotion. Pourquoi t’en as pas parlé ? Il a fallu que ce soit Miguel qui nous l’apprenne, lui reprocha Donna.
- Commercial de terrain, tu parles d’une affaire ! répondit Abdoul. C’est pas ce que je souhaite pour nous. Tout ce que j’y ai gagné, c’est ce costume ringard. L’uniforme maison, à ce qu’il paraît. On doit tous se fondre dans les murs. Vivement que j’aie mon propre bureau et que je puisse m’habiller comme je veux. Enfin, la prime, c’est toujours bon à prendre, surtout quand on fait des projets. Je pourrai t’offrir une jolie bague en attendant, lui promit-il avant de la quitter sur un dernier baiser.
Ainsi, Abdoul ne mentait pas lorsqu’il avait déclaré qu’il voulait faire fortune et que c’est avec elle qu’il voulait la partager. En voyant la bague de Sally, Donna avait eu un pincement au cœur. Elle avait regardé sa main où ne brillait aucun bijou. Elle aurait été si fière de porter à son doigt « cette promesse qu’on caresse en pensant à l’homme qu’on aime ». En lui parlant de cette bague qu’il comptait lui offrir, Abdoul n’imaginait pas à quel point il l'avait rendue heureuse. Elle espérait tout de même qu’il se montrerait raisonnable. Elle se voyait mal porter un bouchon de carafe comme Vilma.
Miguel jouait au coq en pâte. Finalement, il avait eu tort de se faire du mouron. Être fiancé, c’était pas le bagne. C’était un peu comme s’il avait cinq nanas rien que pour lui. Laurène était tellement ravie avec sa bague, qu’elle lui fichait une paix royale et puis y avait le plaisir des yeux. C’était pas désagréable de se cogner à une jolie fille dans tous les coins de la maison. Bon, Sally, c’était râpé et puis Donna l’impressionnait avec ses allures de madame. Mais restaient Mandy et Vilma. Quelle idée il avait eue, André de lui offrir cette bague ? Il s’était donc pas rendu compte du genre de nana que c’était ? Elle lui ferait porter des cornes à plus pouvoir passer sous les portes. Il avait l’œil, lui, il avait repéré ça tout de suite. Quant à Mandy… vous z’allez pas me dire que Joë, suffirait à la satisfaire ? Surtout avec lui dans la place !
- Laurène-chérie, tu peux m’apporter un café ? … Merci, t’es un amour.
Mandy, aussi éloignée des pensées profondes de Miguel que le fixe-chaussette des orteils, venait de se voir nommée officier de patrouille grâce à ses performances physiques.
- Ben… et toi Sally, pas de promotion ? s’était étonnée Vilma. Qu’est ce tu fiches donc, à l’école de police ?
- Ben tu vois, aujourd’hui, j’aurais voulu que tout le monde soit content, alors, sur les lettres de relance pour les PV j’avais attaché une petite fleur à la signature du capitaine et en dessous, juste un petit mot écrit à la main : « Bisou ». Les chefs n’ont pas aimé. Pas aimé du tout.
- Tu m’étonnes ! s’exclama Vilma. T’as même de la veine qu’ils t’aient pas virée.
- Nan, ils pouvaient pas ! Même pas me retirer le peu de point de compétences que j’ai ou me faire une retenue sur mon solde, jubila Sally. Le capitaine m’a convoquée dans son bureau et il se grattait la tête.
- Sous officier de police Sally, j’ai consulté tous les dossiers de jurisprudence établis par le colonel Maxis, on n’a jamais rien vu de tel. Des policiers qui passent par la porte quand il aurait fallu choisir la fenêtre et vice-versa, d’autres qui prennent des vieilles dames à la recherche de leur canari pour de dangereux malfrats ou laissent échapper des suspects -j’en passe et des meilleures- mais la fleur et le bisou sur le PV, ça jamais ! A croire que vous les inventez !
Jean-Paul n’avait pas eu cette chance. Quand une journaliste avait demandé à rencontrer le Député pour lui poser des questions sur la campagne électorale, il avait fait du zèle. Fallait voir le genre des questions : Pensez-vous avoir une chance d’être réélu ? Êtes-vous pour ou contre le maintien des isoloirs dans les bureaux de vote ? Que pensez –vous de l’idée de fermeture des bains-douches municipaux en période de canicule ?
Il allait quand même pas déranger le Député pour ça ! Il avait rempli le questionnaire à sa place.
Calamité ! La journaliste avait déformé ses propos. En particulier ce qui avait trait aux bains-douche. Apparemment, il avait eu tort de répondre que c’était une idée formidable. Ca avait fait la une de la gazette. On pouvait lire sous le gros titre : La crasse pour tous : Le député Jean-Luc Dugenou serait-il près de sa flotte ? Son projet pour la prochaine campagne s’axera autour de la suppression des bains-douches en période estivale…
Ca n’avait pas fait un pli. Jean-Paul avait été licencié immédiatement-sur le champ-illico presto. Il était effondré.
- Je suis un minable ! se lamentait-il. J’aurais jamais dû courir ce risque. Comment annoncer ça à Sally ? Elle allait être si déçue, elle qui l’admirait tant. Plus question de mariage, pas dans ces conditions. Il lui faudrait d’abord retrouver du travail. Comment assumer les frais d’une noce et la caution pour le loyer ? Sans compter toutes ces choses indispensables pour s’installer. Dire qu’il avait déjà pris rendez-vous chez le notaire pour signer le bail.
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