C/12 : Un coup pour rien
- Comment va ma petite femme, ce matin ? T’as passé une bonne nuit ? S’enquit Joë couvant, d’un œil intéressé Mandy en sous-vêtements. Il adorait la voir se balader comme ça. Il la trouvait vachement sexy. Sa grossesse n’avait pas laissé de traces, elle avait toujours un corps parfait.
- Super ! J’ai dormi comme un loir, annonça-t-elle. Remarque, j’en avais bien besoin, je suis fatiguée en ce moment, tu peux pas savoir.
Il compatit :
- Tu te donnes trop à ton boulot.
- Nan, c’est pas ça, je me demande… Elle s’interrompit en avisant son assiette.
- Oooh, t’as fait de l’omelette Joë ?! T’es un amour ! J’avais justement une faim de loup.
Il se rengorgea :
- C’est important de bien commencer la journée avec un petit déjeuner équilibré. Les corn flakes, ça tient pas au corps, les œufs, c’est des protéines. J’y ai ajouté des petits légumes pour les vitamines. Tu sais que les vitamines, c’est la clé de la santé…
- Oui, reprit Mandy, que les considérations de Joë sur l’équilibre alimentaire laissaient un peu froide. Je me demandais si Audrey n’allait pas avoir un petit frère ou une petite sœur plus tôt que prévu.
Joë incrédule :
- Naaan ! T’es sûre ?
- Je-me-de-man-dais, Joë, te t’ai dit ! coupa Mandy. Mais je commence à connaître les signes : fatiguée, toujours la dalle, manque plus que les nausées et je serai fixée.
Elle n’allait pas tarder à l’être. L’omelette aux protéines boostée aux vitamines ne fit qu’un aller-retour express dans son estomac.
- Tu parles d’une crasse ! s’écria la bonne Kérine, qui avait justement décidé de commencer sa journée par la salle de bain.
- Je suis désolée, s’excusa Mandy, les nausées ça prévient pas. Mais j’allais nettoyer !
- Vous inquiétez pas, c’est pas grave, concéda Kérine. Je suis payée pour ça, après tout
-Ma-man ! Ma-man !
Audrey, fit son apparition direction la cuvette des WC. Mandy l’arrêta dans son élan.
- Ah, t’es déjà debout toi ! Bonjour, mon cœur, t’es toute jolie, dis-donc. C’est papa qui t’as habillée ?
- Pa-pa ! répéta Audrey. L’est où papa ?
- Il doit encore être dans ta chambre, viens, on va le chercher, annonça Mandy - en récupérant sa fille sur le chemin de la cuvette. Cécile, lança-t-elle à la nounou au passage, vous ferez attention qu’Audrey n’aille pas dans la salle de bain, elle sait bien que je lui interdis de jouer à la patouille.
Elle en profita pour la sermonner :
- C’est pas beau de jouer avec l’eau de la cuvette, tu le sais ça, maman te l’a déjà dit. Tu manques pourtant pas de jouets.
Cécile les rejoignit dans la chambre et elle la félicita :
- Kérine m’a dit… Il paraît qu’il va y avoir un nouveau bébé ? Je suis drôlement contente pour vous. Un enfant unique, c’est jamais bon, ça fait des petits égoïstes.
- Faut pas dire ça. Tout dépend de l’éducation, nuança Mandy.
Mais Cécile tenait à son idée :
- Je parle d’expérience !
Elle préféra en rester là.
- Ca ne va pas vous faire trop de travail ? Je voudrais pas que vous nous quittiez.
- Vous inquiétez donc pas pour ça. J’adore les enfants, plus il y en a, plus je suis heureuse.
Mandy sourit.
- Oui-ben, on en aura pas une demi-douzaine non plus. Deux ou trois, si Joë est d’accord. Faut déjà que je lui annonce celui-là.
- Oh-mais, j’ai d’autres familles… lâcha Cécile d’un air entendu
Elle s’adressa à sa fille :
Tu préfères quoi ? Ton lapin, ton xylophone ou tes cubes ?
- Cubes ! trancha Audrey.
- D’accord, maman va t’installer avec tes petits cubes dans ta chambre.
Elle la laissa avec son jeu d’encastrement se demandant où était passé Joë.
Elle le retrouva dans le salon, à l’étage, et l’informa d’une voix contrite :
- C’est bien ce que je pensais Joë : Je suis enceinte.
Elle craignait un peu sa réaction. Mais elle avait tort, il ne parut pas autrement ébranlé par la nouvelle, se contentant de répondre :
- Ah-bon. Mais pourquoi tu fais cette tête ? C’est quand même pas un drame.
- Ben-heu… c’est qu’on en avait pas encore parlé. Ca te dérange pas ? T’avais peut-être d’autres projets ?
- Des projets ? Quels projets ? Y a bien ce virus de la maladie inconnue qui fait tomber les habitants comme des mouches dans certains quartiers, sur lequel j’ai l’intention de travailler mais c’est pas un enfant de plus ou de moins qui m’empêchera de chercher. D’ailleurs, Audrey va bientôt fêter son anniversaire et on peut pas dire qu’elle nous ait causé beaucoup de soucis. T’en fais pas, Mandy, tu te tracasses pour rien. C’est des choses qui arrivent quand on ne pense qu’à faire crac-crac. Et pour lui prouver que c’était certainement pas ça qui l’empêcherait d’y penser, il ponctua sa phrase en lui caressant les fesses d’une main de propriétaire.
Nan, Vilma pouvait pas être sérieuse quand elle parlait de divorcer. Après une nuit à ressasser la question dans sa tête, André en était arrivé à cette conclusion : On ne divorce pas pour une petite remarque de-rien-du-tout. Bon, il aurait pas dû l’accuser d’avoir des vues sur un autre. Mais, avouez que y a de quoi se poser des questions quand on voit sa femme, -sa propre femme-, se balader avec une mini-jupe à ras du baigneur. Si c’était pas fait pour allumer le quartier, c’était pour quoi, alors ? Une femme mariée qui se respecte, ça commence par se respecter soi-même en adoptant une tenue qui lui tient lieu de repoussoir à dragueurs. C’est pas qu’il avait pas confiance en elle, encore que… Peut-on jamais faire confiance à une femme ? Je vous le demande.
Heureusement (?), le cabinet d’avocats était fermé hier soir et rien d’irréparable n’avait été accompli. La nuit avait porté conseil à Vilma. Elle avait rêvé de sa mère et de sa grand-mère lui serinant leur vieux refrain : « Ma qué malheur ! Qué tou né fêteras yamais tes noces d’or ». Et elle s’était entendue répondre, comme à l’aube de ses quinze ans : « Si, je les fêterai ! Je les fêterai, et vous serez bien attrapées ! ».C’était plutôt mal barré avec cette menace de divorce.
Elle brandit le drapeau blanc :
- T’as bien dormi ?
- Nan, j’ai fait des cauchemars… et toi ?
- Pareil !
- Aaaah, se réjouit André. Tu vois bien, ça te réussit pas de piquer ta crise. T’as réfléchi, alors ? Tu parles plus de divorcer ?
Elle capitula :
- Nan, mais avoue que t’as exagéré en disant que j’avais quelqu’un en vue. Et QUI, d’ailleurs ? Les voisins, tu les connais aussi bien que moi, -sinon mieux. Alors, tu visais qui ? Miguel ? Ce gros dragueur ramolli du bide et du cerveau ? Abdoul ? Il pense qu’à se tuer au travail pour devenir riche avant de mourir. Faudrait l’avertir une bonne fois que les linceuls ont pas de poches. Jean-Paul-crado ? Pour qu’il me dégueulasse la maison, comme si j’avais pas assez de boulot avec les chiens, merci bien ! Ou alors… Joë ? Tu penses quand même pas que Joë et moi… naaan, dans ce cas t’aurais pas besoin de ressortir ton histoire de poubelle renversée -qui tient pas debout, je te signale- pour le pousser du doigt.
Bien sûr, présenté comme ça… André admit :
- Mouais, t’as raison, j’ai été con. Si tu veux, je t’emmène au resto pour me faire pardonner.
Au resto ? Et comment, qu’elle voulait ! Seulement… la prise de tête au moment d’enfiler son tailleur ! Elle se dit que c’était peut-être pas une bonne idée. Pas la peine de remuer le fer dans la plaie. Sa robe disco ? Il lui avait déjà clairement fait comprendre qu’il la trouvait trop provocante aussi. Alors quoi ? Le tablier ? JAMAIS ! Il allait pas l’obliger à porter cette horreur pour sortir en ville, quand même ! Elle finit par opter pour sa robe de cérémonie en maudissant tous les jaloux et le sien en particulier.
Elle avait pris une sage décision. André approuva son choix.
- Mais, t’es superbe ! Tu vois, quand tu veux. Pas besoin de montrer toute ta boutique. Tu me fais… Vilma, j’ai envie de toi. A la réflexion… c’est peut-être pas une si bonne idée d’aller au restaurant. On pourrait se faire un petit crac-crac chez nous ? Un petit rendez-vous paradisiaque dans notre chambre, qu’est ce que t’en dis ?
HEIN ?!!! Dites-lui qu’elle avait mal entendu.
- Nan, pas d’accord ! Qu’est ce que c’est que binz ? Je te rappelle que tu m’invitais au resto pour te faire pardonner. Alors, moi je fais des efforts, j’essaye de trouver une tenue qui te plaise pour sortir : une qui soit pas trop décolletée, une qui soit pas trop courte, une pas trop tarte… enfin, j’ai fait ce que j’ai pu et maintenant, tu décides qu’on sort plus !
Elle en aurait pleuré.
Elle n’avait rien compris au truc. Il expliqua :
- Ca n’a rien à voir, Vilma. Elle est parfaite, ta tenue. Y a juste que… bon, je peux me retenir, mais j’ai cette envie de crac-crac qui me démange.
Mais elle, elle tenait à sa sortie et elle avait des arguments :
- On a qu’à le faire en ville le crac-crac si ça te démange tant que ça, je suis pas regardante. Y a qu’à aller chez Crypto. Ils ont des cabines de photomaton. Ca serait pas la première fois qu’on ferait ça dans une cabine, tu te souviens ?
Oui-bon, la cabine, c’était pas aussi bien que le lit qui avait le mérite de leur tendre les bras, mais puisqu’il avait promis , il avait promis... Il céda :
- D’accord, on va chez Crypto.
D’où elle savait qu’on pouvait faire crac-crac chez Crypto, au fait ? Oooh, il allait falloir qu’il l’ait à l’œil, et sérieusement en plus.
- Au fait Loulou… t’as pensé à demander une nounou ? s’inquiéta Vilma.
Beuh-oui, qu’il y avait pensé ! C’était même pas une question à poser. Il savait parfaitement s’organiser quand il entreprenait quelque chose, lui. C’était bon pour les bonnes femmes -(suivez son regard)- d’oublier l’essentiel, braquées sur l’accessoire : Ca met un temps fou à se préparer et c’est une fois dans la voiture que ça se met à chercher ses clés. Ca les retrouve pas, -bien sûr-, parce que dans le sac à main, c’est le vrai foutoir et ça arrive en retard aux rendez-vous. Autre exemple, -s’il en fallait : Ca passe des heures à chercher « la » recette du saumon à l’oseille et c’est au moment de passer à l’acte que ça découvre qu’on a ENCORE oublié d’appeler le livreur. Il pouvait lui en citer comme ça des…
Vilma n’écoutait pas. Elle aurait pourtant été bien inspirée d’écouter la leçon. C’est pour elle, qu’il parlait, nom d’un Sim !
- Mais qu’est ce qu’elle fout, la nounou ? s'inquiéta-t-elle, guettant l'arrivée de la voiture par la fenêtre. J’espère qu’elle va pas tarder à arriver.
Verriez pas qu’il change encore d’avis ?
OUF ! La nounou avait quand même fini par se pointer. Vilma avait entraîné André dans la voiture. Soulagée, elle avait même proposé :
- T’étais vraiment pressé pour le crac-crac ?
Un peu, qu’il était pressé ! Ca se voyait pas ?
- Bon, alors… si tu fais attention à ma robe, et si tu m’emmènes chez Crypto après, on peut le faire tout de suite si tu veux.
Ca le mettrait de bonne humeur, et pour une fois qu’ils sortaient, elle n’avait pas l’intention de trimballer un bonnet de nuit.
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