C17 : Miguel sort de son trou
Chez Vilma les choses n’étaient pas allées en s’arrangeant non plus. D’abord, y avait toujours les chiens qui se bouffaient le nez.
Mais y avait pire…
Sarah/Poupougne s’était découvert une adoration pour Karma. Elle aurait pas pu jeter son dévolu sur Thor, ç’aurait été trop beau. Nan, c’est Karma qu’elle aimait, Karma qu’elle câlinait, Karma dont elle voulait devenir la grande amie. Thor, elle s’en fichait comme de l’an quarante.
Serait un tout petit peu contrariante la petite, que ça surprendrait personne.
Mais y avait encore pire…
Hé-nan, vous n’y êtes pas du tout-du tout. Le pire c’était pas André qui faisait encore des siennes. Les rapports de Lucie qui lui apprenaient que Vilma ne bougeait pas de la maison et qu’elle ne voyait personne d’autre que le livreur d’épicerie à l’occasion, l’avaient mis d’une humeur charmante.
- Vous êtes, sûre-sûre, qu’elle ne voit personne ? s’était-il quand même inquiété
- Sûre-sûre-certaine. Je peux vous le jurer avait répondu Lucie prête à le cracher. Et puis, il avait une autre raison de se réjouir. Celle-là même qui faisait que pour Vilma, c’était pas la joie.
Et voua-là. Ca y est, vous y êtes ?
Après leur virée en ville Vilma s’était retrouvée enceinte, ce qui n’était pas du tout inscrit à son programme.
- C’est la pouasse ! avait-elle déclaré quand elle s’était rendue compte qu’elle ne rentrait plus dans son petit tailleur et que malgré de fréquents aller-retours aux toilettes pour y rendre tout ce qu’elle avalait, son ventre allait s’arrondissant.
- Meuh-nan, c’est pas la pouasse, c’est une chance ! avait tenté de lui démontrer André.
Peine perdue, si on en juge par la réponse :
- Je vois pas la chance là-dedans. C’est pas toi qui vas te traîner comme une baleine pendant trois jours, avec toutes les barres qui virent au rouge. Être enceinte, c’est la pire cata qui puisse s’abattre sur une femme.
Oui-ben on lui ôterait pas de l’idée que c’était une chance quand même ! D’abord, lui ça lui disait rien d’avoir une fille unique. Il avait été fils unique et il savait de quoi il parlait : On s’ennuie quand on a ni frère ni sœur avec qui jouer. Et puis il avait bon espoir d’avoir un fils, depuis qu’Abdoul lui avait assuré qu’ils avaient utilisé la bonne recette.
- Je t’ai déjà dit que c’était des conneries ! Y a pas de recette, tout ça c’est du pur hasard, coupa Vilma, le nez dans ses corn flakes.
Rha, fallait toujours qu’elle joue les rabat-joie. Et si c’en était pas des conneries ? Si Abdoul avait raison ?
- Nan, y a pas de « si » C’EST des conneries, je te dis !
Rhalala, ce qu’il pouvait être têtu, c’était pas Sim possible ! Toute la matinée il l’avait serinée avec ça, à essayer de lui faire admettre qu’il y avait peut-être une chance pour qu’Abdoul ait découvert le secret de fabrication des garçons. TOUT LE MONDE le sait que c’est des conneries, mais lui nan. Lui il goberait n’importe quoi.
Et puis elle s’était souvenue qu’elle avait été invitée par Laurène pour l’anniversaire d’Helga. Elle avait sauté sur l’occasion de couper court au bourrage de crâne.
Angie avait été bien surprise de la voir arriver
- Marraine ? C’est toi marraine ? T’es venue pour me voir ?
- Nan. Enfin… entre autres. Tes parents sont là ?
- Maman elle est dans la maison et papa il doit être dans sa piscine, avait annoncé la gamine.
- Sa piscine ? Vous avez une piscine ?! s’étonna Vilma. Ben dis-donc, c’est la classe chez vous ! Il a touché le loto, papa ?
- Oui, enfin nan. Papa il appelle ça une piscine, maman elle dit que c’est un trou de flotte. Parce que c’est papa qui l’a creusée tout seul hier soir et qu’elle est pas tellement grande la piscine. C’est pour ça que tu l’as pas remarquée, expliqua Angie.
- Attends, attends marraine… je te montre quelque chose. Regarde ! Tu regardes, hein ?
Elle voulut l’épater en faisant le poirier, mais dut s’y reprendre à plusieurs fois, avant de trouver l’équilibre et Vilma était peu indulgente.
- C’est comme ça que tu fais le poirier ? Ben j’ai vu mieux !
- Ben attends, je vais te faire la roue, répondit la gamine vexée.
- Nan-nan, te donnes pas cette peine, coupa Vilma, j’ai pas tellement le temps, tu vois. Ta mère est là ?
Ce qui n’arrangea pas les relations entre la filleule et sa marraine.
- Vilma, tu t’es souvenue ? Je suis contente que tu soies venue ! s’écria Laurène. T’as faim ? Tu veux un hamburger ?
- C’est pas de refus, répondit Vilma qui avait un appétit monstre comme toutes les femmes enceintes.
- Môman, c’est qui la dame ? interrogea Wendy
- C’est pas une dame, c’est Vilma la marraine d’Angie, l’informa Laurène. Tu la reconnais pas ?
- Beuh-nan, hein, je l’ai jamais vue moi !
- Mais-si, tu l’as déjà vue, insista Laurène, quand t’étais petite, tu te rappelles pas ?
- Elle était trop jeune, Laurène, elle peut pas se rappeler l’excusa Vilma décidée à ne pas se formaliser.
- Et moi ? J’en ai une de marraine ? C’est qui, ma marraine à moi ? interrogea Wendy
- Nan, c’est pas forcé d’avoir une marraine, Vilma on lui a demandé parce qu’elle s’est beaucoup occupée d’Angie quand elle était bébé, répondit Laurène.
Vilma expliqua de son côté :
- Quand vous êtes nées, on habitait dans la même maison, alors mon mari André et moi, on était un peu comme de la famille, comprends-tu ?
Tout ce qu’elle comprenait, c’est qu’Angie avait une marraine et pas elle. Elle avait trop de veine, Angie.
- Mais tu serais un peu ma marraine aussi, alors ? demanda-t-elle transpirant l’espoir.
- Nan. Vilma, c’est ma marraine à moi ! trancha Angie. Hein, que t’es ma marraine rien qu’à moi ?
- Oui, ma chérie, je suis ta marraine à toi toute seule confirma Vilma, remontant à grands traits dans son estime.
Le verdict tomba :
- C’est pô juste !
- Qu’est ce qu’est pas juste, ma chérie ? s’inquiéta Laurène.
- Ben… que Angie elle a une marraine-la-fée et moi j’en ai pô, expliqua Wendy.
QUELLE marraine-la-fée ?! Qui c’est qui lui avait raconté ces histoires ?
- Ben… dans Cendrillon, la marraine, c’est une bonne fée, elle lui paye tout ce qu’elle veut à Cendrillon et puis elle lui fait rencontrer un prince charmant, et puis…
- On la connaît l’histoire de Cendrillon ! trancha Laurène. Qu’est ce que Cendrillon vient faire là-dedans ? C’est pas Cendrillon, Angie ! Et puis toi, t’as peut-être pas de marraine, mais t’as un parrain : c’est André. Alors, cesse de jouer les martyres !
Wendy se renfrogna. Une marraine-la-fée et un parrain c’était pas du tout pareil.
- Une marraine-la-fée ! se réjouit Vilma plutôt flattée. Les enfants ne manquent pas d’imagination.
Le sourire béat qu’elle avait adopté tapa sur le système de Laurène. Elle se chargea de la ramener sur terre
- Elle lit trop de bouquins. Ca se saurait si t’étais une fée !
- Bon, ben il est temps que je parte, décida Vilma, tout sourire effacé.
- Mais attends un peu ! On devait souhaiter l’anniversaire d’Helga. Wendy, arrête tes bêtises et vas me chercher ton père, ordonna Laurène.
- Papa, chais pô où il est, répondit Wendy de mauvaise grâce.
- Dans son trou de flotte, où tu veux qu’il soit ? Depuis qu’il a décidé de se creuser une piscine, il y passe sa vie, soupira Laurène.
Rhaaa, mais c’était pas possible ça ! CHAQUE FOIS qu’il était dans sa piscine, fallait qu’elles viennent le déranger. Comment elles voulaient qu’il maigrisse si on lui laissait pas une minute ? C’était bien la peine qu’il se donne le mal de la creuser cette piscine. C’est en voyant celle de Jean-Paul que l’idée lui en était venue. Pourquoi il se crèverait à faire de la gym dans sa cuisine alors qu’on pouvait maigrir en se faisant plaisir ? Bien sûr, ça prendrait du temps –surtout si on arrêtait pas de l’appeler pour un oui pour un non. Mais au final, il finirait bien par y arriver.
- Ouais, qu’est ce qu’on me veut encore ? lança-t-il d’un ton acerbe.
- C’est l’anniversaire d’Helga. Maman elle dit que faut que tu viennes la regarder souffler les bougies, l’informa Wendy
Ah-mais, c’est vrai que c’était aujourd’hui, l’anniversaire d’Helga. C’est pas qu’il avait tellement hâte de la voir grandir, notez. M’enfin, on irait toujours pas dire que c’était à cause de lui si elle grandissait mal la bambine. Il prit le temps de se rhabiller et alla même jusqu’à sortir de son chapeau l’attirail des anniversaires : trompettes, crécelles, langues de belle-mères, c’était à qui ferait le plus de potin avec son engin.
Grâce à ça,-ou malgré ça-, Helga grandit en miracle de la nature. C’est là qu’il commença à réaliser ce qui l’attendait. Paceque les nouveaux-nés, du moment que ça a les fesses propres et la panse pleine, ça fout la paix. Mais les bambins ! Ca arrête pas de piailler, ça vous tanne pour se faire chatouiller, ça veut qu’on leur lise des histoires, -combien de fois il s’était pas tapé l’histoire de Cendrillon pour les jumelles, je vous dis pas- faut qu’on leur parle, qu’on leur apprenne tout un tas de trucs qui servent à rien. Pfiou ! Rien que d’y penser, les bras y en tombaient déjà.
- Elle est belle, hein papa, la petite sœur ?
Quoi ?? Qu’est ce qu’elle racontait Angie ? Ah-oui, la petite sœur… ben-oui, elle était belle pardi ! Normal, elle lui ressemblait. Si des fois il avait eu des doutes sur sa paternité, suffisait de regarder ses filles pour voir qu’elles étaient bien de lui.
- Elle est belle la petite sœur ! Elle est belle la petite sœur ! se mit à chantonner Angie entraînant son père dans la danse tandis que Laurène restait figée, transformée en statue de sel.
- Bon ! dit Miguel si vous z’avez plus besoin de moi, je retourne me muscler.
Un cri inhumain l’arracha de nouveau à sa piscine. QUOI ?! Qu’est ce que c’était encore ?
Il n’eut pas à attendre longtemps la réponse :
- C’est un garçon ! C’est un garçon ! criaient les filles à qui mieux-mieux.
- Un garçon ? Nan ? Un garçon ? C’était trop beau pour être vrai. Il aurait fait un gars, LUI ! Pourvu que ce soit pas des bobards. C’était VRAIMENT un garçon ?
- Bah ouais, c’est un garçon, arrête de t’exciter comme ça, conseilla Laurène.
Nan-mais elle se rendait pas compte ! Un gar-çon ! Depuis le temps qu’il attendait ça.
- Passe-le moi, Laurène, passe-le moi que je regarde si c’est un vrai gars, ordonna-t-il.
- T’as pas bientôt fini de l’embêter avec ça ? intervint Vilma. Si elle te dit que c’est un garçon, tu peux peut-être lui faire confiance, nan ? T’as fait la même comédie quand elle a accouché d’Helga ?
Angie n’était pas la moins excitée
- Nan-mais marraine, là c’est un garçon. Un petit frère, tu te rends pas compte ?
- C’est un garçon et alors ? Bon, Laurène, tu m’excuseras, mais je les ai assez entendus, ce coup-ci, j’y vais pour de bon.
Elle prit la porte en levant les yeux au ciel.
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LOLA BLUES
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